Extrait de l'article paru dans le Troglodyte n°14/2000 - Bulletin de la S.P.E.N.E.S. (Société d'Etude et de Protection pour l'Environnement du Nord-Est de la Sarthe)

Cet après-midi du 20 février 2000, la météo étant favorable, je me décide à prospecter une butte, située sur la commune de Mézière-Sous-Lavardin, en quête de quelque reptile précoce. Au bas du coteau, accroché sous une feuille d'un sureau noir (Sambucus nigra), je surprends un citron (Gonepteryx rhamni), qui passe ainsi tout l'hiver dans un mimétisme parfait. Un peu plus tard j'accède sur la partie haute du coteau, en lisière d'un bois de pin, la température est assez élevée, tout est calme, aucun vent. A cent mètres d'une petite mare envahie par des massettes, je décèle un léger mouvement dans les herbes sèches : Une petite libellule brune, du sous-ordre des Zygoptères vole subrepticement, en effectuant de légères saccades, rendant difficile son suivi. Elle se pose le long d'une herbe sèche, puis s'envole de nouveau. Il faut se concentrer pour ne pas la perdre de vue. A plusieurs reprises je la perds, puis la retrouve. A un certain moment la libellule se stabilise. Je profite de l'occasion pour m'approcher doucement et prendre quelques photos. Je reconnais à cet instant le Leste brun (Sympecma fusca). Au posé ses ailes sont jointes, je remarque que les ptérostygmas bruns clair sont décalés entre les ailes antérieures et postérieures. Au passage, je note que c'est un mâle.
Le Sympecma fusca, est la seule libellule qui passe l'hiver à l'état adulte en France. Pendant les périodes de froid, ces adultes se réfugient sous les amas de feuilles mortes, les touffes d'herbes sèches, les tas de fagots... Le premier soleil les fait sortir, et, à cette occasion, on peut les voir voler dans des endroits protégés. Toutefois sa rencontre hivernale reste un événement. Ce phénomène a déjà été constaté dans l'Orne le 24/02/1991 par Stéphane Lecocq.

Dans son catalogue des Odonates de la Sarthe de 1934, Déan-Laporte signale sa présence d'août jusqu'en octobre. Personnellement en dix années de prospection dans le département, j'ai constaté que l'espèce apparaît parfois en mars, puis en nombre en avril, auprès de certaines zones d'étangs forestiers, et parfois aussi auprès d'anciennes gravières, pour s'accoupler et pondre, puis les effectifs déclinent jusqu'à début juin. Sa présence se décèle de nouveau dès la fin juillet, au moment des émergences, et ce jusqu'en octobre, parfois début novembre. Les individus se dispersent ensuite pour hiverner.